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Blauth-Henke

Christine Blauth-Henke (Tübingen)

Christine Blauth-Henke

« … je ne me trompai point sur ce qui devoit y faire la matière de mes leçons. »[1]

Gattel et l’enseignement de la Grammaire générale à Grenoble

 

1. Idéologues de la capitale et idéologues de province

« Le seul homme parfaitement à sa place était M. l’abbé Gattel, abbé coquet et propret, toujours dans la société des femmes, véritable abbé du XVIIe siècle; mais il était fort sérieux en faisant son cours et savait, je crois, tout ce qu’on savait alors des habitudes principales des mouvements d’instinct et en second lieu de la facilité et d’analogie que les peuples ont suivie en formant les langues. »[2]

Telle est la description de Claude-Marie Gattel, professeur de Grammaire générale à l’École centrale de Grenoble, donnée par son (ancien) élève Stendhal. Certes, l’influence des idéologues sur l’œuvre de Stendhal a fait l’objet de plusieurs études[3] et Gattel figure dans des études et des expositions consacrées à la vie et l’œuvre de Stendhal.[4] Mais son activité de professeur de Grammaire générale n’a fait l’objet d’aucune étude approfondie jusqu’à ce jour. La présente étude – issue du projet de recherche La formation du discours: la Grammaire Générale dans les Écoles Centrales (1795-1802) dirigé par Brigitte Schlieben-Lange[5] et se situant par conséquent dans le cadre théorique de ce projet[6] – se propose de contribuer à combler cette lacune. À travers l’étude des documents relatifs à l’enseignement de la Grammaire générale à l’École centrale de Grenoble, nous tenterons de reconstruire l’enseignement de la Grammaire générale tel qu’il a été conçu par Gattel.
    La question fondamentale de cette étude est de savoir dans quelle mesure le programme poursuivi par Gattel correspondait aux théories sémiotiques des idéologues, ou, autrement dit, si Gattel était un ‘idéologue de province’. Car, si c’est un fait bien connu que les idéologues –


[1] Lettre de Gattel au Ministre de l’Intérieur du 15 vendémiaire an 7 [06/10/1798] (AN F17 1344).

[2] Stendhal 1890: 4. Stendhal fut élève de l’École centrale de Grenoble de 1796 à 1799 (cf. Nerlich 1993: 138).

[3] Cf. Picavet 1891; Alciatore 1954; Berrian 1955; Del Litto 1962; Birnberg 1979; Crouzet 1981; Kimmich 2002; Chilcoat 2005.

[4] Cf. p.ex. Nerlich 1993: 17s.; Hamon 1964.

[5] Cf. Hafner/Schlieben-Lange 1998. L’article est basé sur mon mémoire de fin d’études (2002) issu de ce projet. Par conséquent une partie des documents cités était déjà disponible et le travail reflète nécessairement les discussions menées au sein du projet. Les documents et manuscrits conservés à la Bibliothèque municipale de Grenoble et aux Archives départementales de l’Isère avaient en partie été répertoriés par Ilona Pabst. Une bourse des ‘Quatre moteurs pour l’Europe’ m’a permis de consulter les documents relatifs à Gattel et l’École centrale sur place en Février 2001. Je tiens à remercier le personnel de la Bibliothèque municipale de Grenoble et notamment Marie-Thérèse Imbert pour leur coopération. Les discussions avec les collaborateurs du projet et surtout le soutien apporté par Ilona Pabst et Jochen Hafner ont été particulièrement précieux.

[6] Les deux parties centrales de ce cadre théorique sont d’une part la formation du discours et d’autre part l’ana­lyse sérielle. L’idée principale du projet (cf. Hafner/Schlieben-Lange 1998) est que les processus historiques de la formation (et de la transformation) d’un programme de recherche, d’un discours, méritent tout aussi bien notre attention que la structure d’un tel programme de recherche qui est souvent au centre de la recherche sur l’histoire de la science (cf. notamment la conception de ‘discours’ dans la tradition de Foucault 1966). C’est à travers l’analyse sérielle de documents que nous pouvons arriver à comprendre ces (trans-)formations (cf. entre autres Schlieben-Lange 1991, Haßler 2000).

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présents par exemple au sein du Comité d’Instruction Publique – marquèrent de leur sceau l’organisation des Écoles centrales,[7] la mise en pratique dans les Écoles centrales, « l’activité développée par nombre d’idéologues de province »[8], est peu connue. Le cas de l’enseignement de la Grammaire générale est particulièrement intéressant dans ce contexte, car d’une part, il s’agissait d’une nouvelle matière dont le contenu restait à préciser, d’autre part cette matière reflète plus qu’aucune autre la pensée idéologique et les idéologues lui attribuèrent une position-clé dans la conception des Écoles centrales.[9] Mais comment peut-on définir un idéologue de province ? Brigitte Schlieben-Lange a démontré que la définition du groupe des idéologues n’est pas sans poser problème et qu’il faut tenir compte de plusieurs dimensions – comme par exemple le programme de recherche commun, l’auto-identification et l’hétéro-identification du groupe – dans cette classification.[10] Afin de répondre à la question de savoir dans quelle mesure Gattel peut être considéré comme idéologue de province, il faut par conséquent tenir compte des aspects suivants: 1o Comment Gattel se positionne-t-il par rapport aux idéologues ?[11] 2o Y a-t-il une évolution de sa conception de l’enseignement de Grammaire générale et si oui, cette évolution peut-elle être mise en relation avec la correspondance entre Gattel et le ministère ? 3o Comment Gattel est-il vu par les idéologues ?[12]
    La présente étude se base d’une part sur des « données extra-textuelles » (des aspects biobibliographiques comme l’âge et l’éducation du professeur ainsi que par exemple la littérature utilisée dans les cours de Grammaire générale) et sur « l’analyse interne des documents » d’autre part.[13] En ce qui concerne la seconde partie, l’étude de l’enseignement de la Grammaire générale à Grenoble peut avoir recours à toute une série de documents qu’on pourrait classer dans quatre catégories. D’une part, il y a la correspondance des ministres de l’Intérieur, responsables de l’Instruction publique, avec les professeurs. Il s’agit là notamment
  


[7] Pour l’influence des idéologues sur l’organisation des Écoles centrales cf. Picavet 1891. L’introduction de la Grammaire générale comme nouvelle matière témoigne tout particulièrement de leur influence dans la conception de ces nouvelles écoles.

[8] Schlieben-Lange 1990: 541. C’est précisément cette activité des idéologues de province qui est au centre du projet mentionné ci-dessus.

[9] Cf. Schlieben-Lange 1992: 219; Hafner/Schlieben-Lange 1998: 134. Cette position-clé est mentionnée dans la circulaire du 5e jour complémentaire an 7: « En effet, Citoyen, dans l’ensemble de l’éducation, votre cours doit être le complément et le couronnement des cours de langues anciennes, et l’introduction aux cours de belles-lettres, d’histoire et de législation. » (AN F1713384). Destutt renvoie lui aussi à la position-clé de l’enseignement de Grammaire générale (Destutt 1801: 8s.).

[10] Cf. notamment Schlieben-Lange 2000.

[11] Ce positionnement peut être implicite (à travers la terminologie utlisée, les auteurs lus en cours etc.) ou explicite (p.ex. dans des commentaires favorables ou non aux conceptions des idéologues).

[12] La source la plus importante pour ce jugement est le rapport présenté au ministre de l’Intérieur, par le Conseil d’Instruction Publique du 16 pluviôse an 8 [05/02/1800] qui est basé sur les réponses des professeurs à l’enquête du 20 floréal an 7 [09/05/1799] (AN F17 1341 AB).

[13] Cf. Schlieben-Lange 1992, Hafner/Schlieben-Lange 1998: 134.

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des circulaires et des réponses à ces circulaires. D’autre part, il y a un grand nombre de textes concernant l’organisation de la vie quotidienne dans les Écoles centrales et qui contiennent aussi des informations sur l’enseignement de la Grammaire générale: ce sont sans doute les programmes des cours qui contiennent le plus d’informations, mais les procès-verbaux des distributions des prix et les règlements peuvent aussi être très instructifs. La troisième catégorie de documents reflète pour ainsi dire plus directement le contenu du cours. Si nous disposons de ces manuscrits[14] pour certains départements, cela est dû au fait que le Conseil d’Instruction publique demanda aux professeurs d’envoyer des cahiers[15]. Pour la Grammaire générale, les manuscrits de 20 départements avaient été envoyés au CIP jusqu’au 30 prairial de l’an 7. D’après ce que nous savons, Gattel n’a jamais envoyé de tels manuscrits.[16] Cependant, la bibliothèque municipale conserve deux manuscrits, qui doivent être attribués à cette catégorie: il s’agit d’un manuscrit non daté de la main de Gattel portant De la Grammaire,[17] et du cahier d’un élève de l’an 8.[18] La comparaison des deux manuscrits justifie l’hypothèse que le manuscrit de Gattel lui servait de base pour son cours, très probablement pour l’an 8.[19] Enfin, la quatrième catégorie de documents renferme des recueils de manuscrits concernant le langage, dont notamment deux discours de Gattel.[20] Pour la présente étude nous allons nous limiter à l’analyse de la correspondance de Gattel avec les ministres, des textes officiels et du manuscrit de Gattel. Dans le cadre de cette analyse, nous devons nous borner à quelques renvois aux discours de Gattel. Il va sans dire que ces discours mériteraient une


[14] Quelques-uns de ces manuscrits ont même été imprimés par la suite, souvent qu’après l’abolition des Écoles centrales. Les grammaires de Mongin et Estarac comptent sans doute parmi les exemples les plus connus de ce type de documents. Pour Mongin cf. Schlieben-Lange 1990.

[15] Dans la circulaire du 17 vendémiaire an 7 [08/10/1798] (AN F17 13385) nous pouvons lire: « Cette vue paraît présenter une idée assez neuve sur la distinction à faire des ouvrages classiques propres aux Écoles centrales, en deux parties diverses: I.o le livre de l’élève; 2.o le livre du maître. »

[16] Dans sa réponse à la circulaire du 20 floréal an 7 [09/05/1799], il justifie ce fait par la méthode de son cours: « [Il] n’a point envoyé de cahiers, parce qu’il n’en dicte point. son cours est purement audition. » (AN F171344).

[17] De la Grammaire […] (BM Ms 3968).

[18] Cours manuscrit de l’élève Sabattier (BM R. 12347). Ce manuscrit consiste en 340 p. liées in-quarto. Le manuscrit commence avec une introduction à la logique. La deuxième partie, sur la Grammaire générale, se termine sur le début du chapitre concernant les Éléments de Syntaxe, plus précisément sur le chapitre « Gallicismes ». Le manuscrit de Gattel contient donc des parties non présentes dans le manuscrit de l’élève, ce qui pourrait signifier que Gattel n’a pas pu traiter la totalité de son manuscrit. En ce qui concerne la partie sur la Logique, le début du cours de l’élève consiste en une description détaillée des sens qui ressemble à un traité de physique ou plus précisément d’optique (composition de la lumière, perception de la lumière par l’homme etc.). La partie sur la Logique du manuscrit de Gattel commence par la description des Facultés de l’ame. Il faudrait voir si les éléments présents dans le cours de l’élève se trouvent dans un des autres manuscrits de Gattel, par exemple dans le cours de physique.

[19] Le fait qu’il s’agit du cahier de l’an 8, donc directement après la circulaire du 5e jour complémentaire de l’an 7 dans laquelle le non-envoi de matériel du cours était critiqué, laisse soupçonner que Gattel avait l’intention d’envoyer ce cahier au ministre.

[20] Discours sur l’origine & les progrès du langage. (BM Ms 3982); Discours sur la Grammaire & l’étude des langues. (BMMs 3984).

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lecture plus détaillée qui compléterait la vue sur l’enseignement de la Grammaire générale à Grenoble.

 

2. Gattel et l’enseignement de la Grammaire générale à Grenoble[21]

2.1. Claude-Marie Gattel – Remarques biobibliographiques

Dans l’arrêté du 4 fructidor de l’an 4 [21/08/96], l’administration départementale[22] fixe l’instauration de l’École centrale au 2 frimaire an 4 [23/11/1795].[23] Royer, président de l’administration du département de l’Isère,[24] informe Gattel de sa nomination à la chaire de Grammaire générale et souligne la légitimité de cette nomination dans une lettre du 26 ventose an 4: « Les talens que vous avez deployés dans cette carriere, vous donnoient depuis


[21] Chalvet, professeur d’histoire à l’École centrale de Grenoble, mentionne l’existence d’une École centrale supplémentaire à Vienne. (Rapport sur l’état de l’Instruction publique dans le département de l’Isère (AN F17 134418)).

[22] Selon la Loi Daunou, les administrations départementales étaient responsables de l’organisation des écoles du département. Le 4 Messidor [22/06/95], c’est-à-dire avant la Loi Daunou, le lieu de la future école est déterminé dans un arrêté du représentant du peuple Dupuis: « L’École Centrale du departement de l’Izere sera Etablie dans le cydevant Eveché et tous les Bâtiments qui en dependent, immediatement seront affectés soit au placement des Salles de cabinet et Bibliotheque Soit au logement des professeurs. » (AD L 515).

[23] Cet arrêté contient également le règlement de l’école concernant par exemple les horaires des cours, la méthode de l’enseignement, les examens et la distribution des prix; au cours de l’an 5 deux autres arrêtés en préciseront le contenu. (AD L 517). L’École centrale de Grenoble semble bien fréquentée dès le début. Elle compte 196 élèves en l’an 5, 276 en l’an 6 et 406 en l’an 7. (Tableau du nombre de Citoyens qui ont assisté aux Cours de l’Ecole centrale de l’Isère. (AD L 516)). Les arrêtés et règlements concernant l’École centrale de Grenoble reflètent le souci des administrateurs de répondre aux attentes ministérielles. Tandis qu’il n’y a pas d’arrêtés et règlements pour l’an 6, le 19 brumaire 7 [09/11/1798] l’Administration Centrale décrète un nouveau règlement qui devait remplacer celui du 4 fructidor an 4 [21/08/1796] et qui contenait les changements « que l’expérience de deux années a rendu nécessaires ». Cet arrêté reflète l’influence des circulaires ministérielles, qui sont citées comme base de l’arrêté tout au début de celui-ci. Les circulaires du 20 fructidor an 5 [06/09/1797], du 24 messidor an 6 [08/07/1798], et du 17 vendémiaire an 7 [08/10/1798] sont contenues dans l’annexe de l’arrêté.

[24] L’administration centrale semble avoir eu un intérêt particulier pour l’enseignement de la Grammaire générale. Ainsi, l’importance de cet enseignement pour la formation d’une nouvelle élite républicaine soulignée dans un discours lors de la distribution des prix de l’an 7: « […] le président de l’administration Centrale a ouvert la séance par la lecture d’un discours, dans lequel, après avoir fait observer combien l’instruction était utile aux nations, puisqu’elle seule pouvait les affranchir de l’esclavage, et leur garantir les jouissances de la liberté, il a démontré que le bonheur individuel et celui de la société, faisaient à tous ses membres un devoir de se livrer à l’étude; […] |10 Mais de toutes les études, celles auxquelles vous devez apporter le plus d’attention, intéressants élèves de la patrie, sont la logique et la grammaire générale. / En étudiant les élémens de la parole, vous apprendrez à vous passer de ces tristes rudiments qui ont fait le malheur de notre jeunesse. / Socrate, Platon son disciple, Loke, Condillac, ont heureusement influé sur les progrès de tous les genres de connaissances. / En étudiant ces grands modèles, vous mettrez de l’ordre dans vos idées; vous acquerrez cette précision, cette justesse philosophique qui rachète la sécheresse du sujet par la netteté des conceptions. / Que vos idées soient justes, que vos pensées soient libérales: vos ames pures et neuves, sur la scène du monde, voient dans vos condisciples des émules, et jamais des rivaux: conservez d’aussi généreux sentiments. / Vous les devez aux heureuses dispositions qui vous sont naturelles; vous les devez aux exemples et aux instructions que vous transmettent vos professeurs. / |11 Non contents d’éclairer vos esprits par les sciences, ils veulent encore pénétrer vos ames des principes de toutes les vertus, de cet amour sacré de la patrie qui convient à des républicains. / Vous appartenez à la patrie, qui fonde sur vous ses espérances les plus chères. Elle a droit de s’assurer que vous remplirez son attente, en profitant des lumières qu’on vous donne et des sentiments qu’on vous inspire. » (AD L 517; cf. aussi BM O.2012). Dans une lettre à Gattel, le préfet Royer le remercie de lui avoir envoyé son dictionnaire Français-Espagnol (BM R 5758).

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longtemps des droits a cet employ honorable, que vos concitoyens et L’administration se sont empressés de vous assurer. »[25]
    Gattel n’était pas un inconnu à Grenoble; il avait été non seulement professeur de philosophie, physique et mathématiques au collège de Grenoble de 1767 à 1786, mais aussi avocat au Parlement de Dauphiné et Secrétaire en chef de la première présidence du Parlement de Grenoble.[26] Le cas de Gattel illustre l’étude de Compère, selon laquelle un pourcentage significatif des professeurs de Grammaire générale avait déjà enseigné dans les collèges.[27] Les professeurs recrutés au sein des collèges y avaient enseigné soit la Grammaire soit la Logique. Gattel appartient au deuxième groupe, ses matières faisant partie de l’enseignement de Logique. Né le 20 avril 1743 à Lyon,[28] Gattel appartient à la « moyenne génération » de professeurs de Grammaire générale[29] et a reçu une formation très traditionnelle. Après une première formation chez les jésuites à Lyon, il est bachelier à la Sorbonne et passe ensuite au séminaire St-Sulpice à Paris. Le 4 novembre 1764, il devient docteur en théologie et commence aussitôt à enseigner comme professeur de philosophie au séminaire St-Irénée à Lyon. Il est maître de conférences en théologie entre le 1er octobre 1766 et les vacances de 1767 avant de devenir professeur au collège de Grenoble et proviseur remplaçant de la même école. Lorsqu’en 1786 le collège est donné à la congrégation St-Joseph, Gattel le quitte et se consacre principalement à ses études sur le langage et les langues étangères.[30] La réflexion sur le langage et les langues paraît être centrale pour Gattel. Dans un


[25] (BM U 5006). Dans une notice historique anonyme (ainsi que dans plusieurs biographies), nous trouvons une date divergente: « Le directoire du département de l’Isère le nomma Professeur de grammaire générale à l’École Centrale de Grenoble. Personne mieux que lui ne pouvoit y porter cet esprit d’analyse et de méthode, cette finesse de tact et de goût qui l’ont distingué. Il occupa cette chaire depuis le 5 ventôse an 4 jusqu’à la fin de l’an 12 (1804). » Notice historique sur Claude-Marie Gattel: 1. (BM U 5249) Gattel accepte la nomination dans une lettre à Royer du 3 germinal an 4 (BM U 5007).

[26] Il exerça cette fonction jusqu’à la dissolution du parlement en 1790. En 1793, il fut incarcéré à Ste-Marie d’en Haut à Grenoble.

[27] Compère 1981: 44.

[28] Le 10 avril selon Hoefer 1852. Cependant, le 20 avril figurant dans la majorité des biographies, cette date pourrait être due à une faute de frappe.

[29] Cf. Schlieben-Lange (1992: 220) constate la sous-représentation des professeurs de cette génération et la caractérise comme plutôt conservatrice.

[30] Gattel est l’auteur de plusieurs dictionnaires (notamment le Nouveau dictionnaire portatif de la langue françoise qui a vu plusieurs éditions, dont une (1797) qui contient « les mots nouveaux introduits par la Révolution françoise » et un Dictionnaire françois-espagnol/espagnol-françois) et de traductions (Gusta (Le P. Francisco), S.J., Mémoires de Sébastien-Joseph de Carvalho et Mélo, comte d’Oeyras, marquis de Pombal, […] Lisbonne 1784; Veneroni (Jean Vigneron dit), Maître italien, ou Grammaire françoise et italienne […], Avignon, 1800). C’est son travail de lexicographe, et surtout son Dictionnaire portatif, qui a rendu Gattel célèbre même au-delà des frontières de Grenoble. Stendhal écrit: « M. Gattel avait fait un fort bon dictionnaire où il avait osé noter la prononciation, et dont je me suis toujours servi. » (Stendhal 1890: 4). Et le Magasin encyclopédique ou Journal des sciences le loue comme meilleur ouvrage de ce genre et renvoie au fait que Gattel a inclu les mots nouvellement introduits par la Révolution et discute « l’abus le plus perfide du langage » (IVe Année, An VI. - 1798; 141-143).

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discours devant la Société littéraire qui vient de l’accepter comme membre, Gattel souligne l’importance qu’il attribue à la « Science grammaticale »:

« […] La Science Grammaticale à laquelle je suis aujourd’hui voué par état, & vers laquelle aussi je ne sais quel attrait m’avoit porté depuis longtemps; la Science grammaticale, seche, abstraite, hérissée de difficultés tenant à une métaphysique aussi subtile que profonde; sait assez qu’elle doit moins inspirer à plaire qu’à être utile. Si dans l’édifice des connoissances humaines, c’est elle qui pose les fondemens, c’est |2 par d’autres secours que les siens que s’élèvent ces […] qui étonnent par leur hardiesse, en imposent par leur […] ordonnance, ou charment par leur élégante simplicité. Dans le vaste champ de la littérature, la Grammaire ne fait pas naître les roses; mais elle nettoye, elle prépare le sol où d’autres mains les font ensuite fleurir. »[31]

Après l’abolition des Écoles centrales, Gattel sera proviseur du lycée de Grenoble[32] jusqu’au 1er janvier 1810, date à laquelle il prend sa retraite. Gattel meurt à Grenoble le 12 juin 1812.
    Trois aspects de la vie de Gattel semblent être importants pour l’analyse de son activité de professeur de Grammaire générale: Gattel en tant qu’enseignant, en tant que lexicographe et en tant que traducteur. Les deux derniers aspects montrent que l’intérêt que Gattel avait pour le langage était du moins en partie un intérêt ‘pratique’. Il faudra voir dans ses écrits sur la Grammaire générale si cette orientation pratique s’y perpétue.

 

2.2. Correspondance avec le ministère

C’est un fait bien connu que les circulaires du ministre de l’Intérieur furent envoyées à toutes les Écoles centrales.[33] Quant à la définition du contenu du cours de Grammaire générale, l’on distingue généralement deux périodes[34]: dans un premier temps, les professeurs étaient très libres dans la définition du contenu de leur cours. Seules quelques recommandations de livres[35] servaient de points de repère. Dans la circulaire du 20 floréal an 7 [09/05/1799], le ministre demanda aux professeurs de répondre à des questions concernant leur âge, leur formation et le contenu et la méthode de leur cours. Ce n’est que dans la circulaire du 5e jour

[31] (BM Ms 3987). L’esquisse non datée (Ms, 7pp.) fait partie de deux cahiers qui contiennent d’autres esquisses ainsi que des recueils de citations.

[32] « Que le Citoyen Gatel, voué depuis trente six ans aux fonctions de l’Enseignement public qu’il a exercés dans cette ville presque sans interruption en divers qualités, avec autant de zèle que de succès; d’abord comme professeur de philosophie et de phisique experimentale. puis en qualité de Prefet du college. Ensuite a la formation de l’Ecole centrale de ce département; il a professé la grammaire générale et a contribué pour sa part a obtenir a cette Ecole la Réputation méritée que lui ont valu les talens des Professeurs, et les progrés des Éleves; qu’il n’est étranger à aucune partie de l’Enseignement, que sa Réputation d’homme Savant, et d’homme de lettres est fondée sur les ouvrages qu’il a donné au public et principalement son dictionnaire Espagnol qu’on reimprime actuelement qu’il est designé pour la place de proviseur du Lycée de Grenoble par les suffrages de ses collegues à l’Ecoles centrale et le vœu unanime de la cité. » Extrait Parte-Inqua du Registre des délibérations du Conseil Municipal de la ville de Grenoble. Du 5 Thermidor an onze [13/07/1803] de la République française (AN F17 134418).

[33] Cf. Désirat/Hordé 1982.

[34] Cf. Hafner/Schlieben-Lange 1998: 136.

[35] Les auteurs recommandés dans la circulaire du 24 messidor an 6 [12/07/1798] sont Locke, Condillac, Dumarsais, Court de Gébelin, Debrosses, Harris et Thurot. Il est probable que ces livres furent envoyés aux bibliothèques des Écoles centrales, du moins cet envoi est annoncé par la même circulaire (AN F17 13384).

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complémentaire de l’an 7 [21/09/1799] que le contenu du cours est défini.[36] Cette circulaire fut envoyée à tous les professeurs qui n’avaient pas encore envoyé de cahiers ou dont les manuscrits ne correspondaient pas à l’intention du CIP. Les réponses des professeurs à ces circulaires constituent une des sources les plus importantes pour l’étude de l’enseignement de la Grammaire générale. Il est particulièrement important de voir s’il y a des changements dans la définition donnée par Gattel avant et après la circulaire du 5e jour complémentaire.
    Dans le cas de Gattel, nous disposons de deux lettres et d’une esquisse de lettre. La première lettre non datée[37] contient les réponses aux questions du ministre François de Neufchâteau du 20 floréal an 7 [09/05/1799][38], la deuxième lettre du 15 vendémiaire an 8 [07/10/1799][39] est la réponse à la circulaire du ministre Quinette du 5e jour complémentaire. L’esquisse de lettre correspond très probablement à une lettre mentionnée par Gattel dans sa lettre du 15 vendémiaire et qui contient des remarques sur le projet d’un concours général exposé dans la circulaire du 10 germinal an 7 [30/03/1799].[40]
    La réponse à la circulaire du 10 germinal an 7 [30/03/1799][41] semble être motivée par le souci que le concours général proposé dans cette circulaire pourrait avoir des désavantages pour les élèves. Gattel s’empresse d’accueillir favorablement cette proposition mais souligne qu’il faudra d’abord rendre l’enseignement plus uniforme:

« Le Professeur de Grammaire Générale, en applaudissant au zèle éclairé du Ministre de l’intérieur pour le progrès de l’instruction; en desirant que la mesure qu’il propose n’éprouve aucun ni obstacle ni inconvénient; en convenant de l’avantage que, devenue praticable, elle ne pourra manquer de produire, ne peut s’empêcher de penser que. Pour être […] / la mettre / précisement à exécution, il faudrait peut être attendre que l’instruction / publique en France / fut / fusse plus uniforme […] toute l’étendue de la République / en France / e & surtout plus qu’elle [fût] avancée. »

Notamment la méthode du cours ne lui paraît pas encore assez définie.[42] Tandis que selon Gattel le but de l’enseignement de la Grammaire générale est toujours de traiter « les


[36] Cf. Schlieben-Lange 1992, Hafner/Schlieben-Lange 1998.

[37] Selon une lettre jointe au recueil des réponses des professeurs, ces réponses avaient été envoyées le 10 prairial an 7 [29/05/1799]. AN F17 1341AB.

[38] AN F1713444.

[39] AN F17 13442.

[40] Girard (1955: 92) suppose que Gattel a proposé un tel concours général alors qu’il s’agit d’une proposition du minstre. Cette interprétation démontre la nécessité de connaître les circulaires.

[41] BM R 5632.

[42] « La Loi du 3 Brumaire an 4 a bien organisé sur un même plan toutes les Écoles Centrales de la République; elle y a bien établi les mêmes nombre de / nombre de / cours; elle a bien assigné l’objet commun de châcun deux: mais elle a laissé fait dans la méthode d’enseignement & dans la manière dont cet objet général seroit traité, une latitude que la localité & une multitude foule d’autres circonstances ne permettoient pas guere en effet de circonscrire / du moins / encore dans des bornes plus étroites. Il a du en résulter presqu’inévitablement des divergences qu’il sera peut être difficile de ramener à un point unique & central, surtout avec de jeunes élèves peu accoutumés à envisager sous des points de vue généraux des questions que leur âge les gradati les gradations à observer / dans / le développement progressif de leurs facultés intellectuelles, n’ont pas permettoi du leur faire présenter jusqu’à présent d’une manière aussi abstraite. » (BM R 5632).

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principes généraux de la parole d’après l’analyse même de la pensée », les chemins pour y arriver sont très différents. C’est pour cette raison qu’il est à son avis trop tôt pour introduire un concours général, surtout « dans des matières aussi neuves pour les élèves, qui les éloignent si fort des idées qu’il aussi abstraites surtout ». Gattel semble penser que ce qu’il enseigne ne pourrait éventuellement pas satisfaire aux exigences du ministère et justifie sa démarche par le fait qu’il ne veut (et ne peut) pas trop exiger de ses élèves:

« La plupart de ces élèves n’ont juste que l’âge prescrit par la loi pour être admis dans la Troisième section des Écoles Centrales c’est à dire seize ans; presque tous faisaient suivent concuremment d’autres / plusieurs cours & n’y ont apporté d’autres connoissances que celles qu’ils avoient précédemment puisées dans les / autres / sections inférieures. Or à cet âge […] les moyens préparatives, peut doit [on] attendre quel que soient leur zèle, [&] leur émulation / leurs dispositions même, / que leur tête soit / qu’ils aient la tête & assez mûre & assez |2 meublée pour pouvoir / qu’ils puissent / pouvoir sans méditation préliminaire, sans secours d’aucune […], trouver subitement dans leur propre fonde la solution d’une question grammaticale qui par la nature du concours projeté, réduite nécessairement à ses termes les plus généraux, leur paroitra peut être n’avoir aucun rapport, ou du moins n’en avoir de que de très éloignés avec ce qu’ils auront appris. »

À cet égard, la différence entre les élèves de la première année de la création de l’École et ceux venus après semble être considérable:

« on vit s’empresser d’y accourir tous les jeunes gens qui, nés avec le goût des lettres / & quelques dispositions / , on vient, au milieu des tenebres dont le Vandalisme menaçoit d’envelopper la France, trouvé le moyen de les cultiver. Dans le nombre il […] / y en avoit / plusieurs âgés de 20 ans & au dessus dont le jugement […] plus formé, & l’esprit plus l’intelligence plus exercée / développée / & l’esprit plus exercé & plus / […] auraient soutenu sans peine l’épreuve du / de ce concours général. Aujourd’hui ce n’est plus la même chose: cette première génération, si l’on peut se servir de ce terme, a été rapidement épuisée; il en nait une nouvelle, qu’on ne peut assujetter qu’à des travaux proportionnés à sa foiblesse, &, avant d’en exiger les mêmes résultats, il faut attendre qu’elle ait acquis plus de fond / vigueur / & de maturité. »

À la fin de la lettre, Gattel donne une description de son cours et prie le ministre de s’éloigner le moins possible de ce plan. Ce plan est exactement le même qu’il donne dans sa réponse à la circulaire du 20 floréal an 7 [09/05/1799].[43] Les renseignements sur son cours concernent la méthode et le contenu. Quant à la méthode, il ne dicte pas mais préfère « faire prendre, à la fin


[43] AN F17 13442. La réponse à cette lettre contient également des renseignements sur les conditions dans lesquelles se déroule le cours: « Le règlement assujettit le professeur à quatre leçons par décade; il en donne souvent cinq. » Le nombre d’élèves suivant le cours de Grammaire générale est dix pour l’an 5, cinq pour l’an 6 et sept pour l’an 7. Le nombre d’élèves dans cette filière semble avoir été plutôt bas. Ainsi le Procès-verbal de la Distribution des prix de l’an 6 contient la remarque suivante: « L’Administration a vu avec plaisir que les élèves de ce cours, loin de se laisser décourager par les difficultés inséparables d’une étude aussi abstraite qu’importante, ont redoublé d’efforts et de zèle pour les surmonter. / L’Administration regrette de n’avoir pas trouvé dans les quatre cours dont il vient d’être fait mention, un aussi grand nombre d’élèves qu’elle aurait désiré; elle espère que |16 les jeunes citoyens et leurs parents sentiront enfin de quelle utilité et de quelle importance est l’étude qui en est l’objet, sur-tout dans un gouvernement républicain, où tous les citoyens sont appelés par la constitution. Et peuvent être portés par leur mérite, aux fonctions les plus relevées, fonctions qu’on ne peut remplir dignement qu’en réunissant aux vertus et aux lumières, la justesse de l’esprit et le talent de l’élocution. » (AD L 517).

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de chaque leçon, à ses élèves de courtes notes sur ce qui en a été l’objet. » Chacun rédige ensuite « son extrait écrit de cette même leçon » et « le lit dans les récapitulations qui ont lieu à la fin de chaque décade ». Gattel corrige ces extraits afin que chaque élève ait « son propre ouvrage ». « Cette méthode a paru au professeur la plus propre à fixer, pendant les leçons, l’attention de ses élèves, & à les former graduellement soit à l’art de penser, soit à celui d’écrire. » Gattel se conforme donc au règlement contenu dans l’arrêté de l’administration centrale du 19 brumaire an 7 [09/11/1798] qui reflète l’influence des circulaires ministérielles.[44]
    En ce qui concerne le contenu du cours, Gattel se réfère à Condillac pour la partie qu’il appelle ‘Logique’ et à Beauzée pour la Grammaire générale proprement dite:

« Voici du reste le plan qu’il suit dans son cours. il commence par une analyse des facultés & des opérations de l’esprit humain, tirée en grande partie de l’excellente Logique de Condillac, à laquelle il joint les développements convenables, d’après Locke & les meilleurs métaphysiciens modernes. […] Pour la Grammaire générale proprement dite, il suit principalement celle de Beauzée, qui, quoique trop diffuse lui a paru la plus méthodique, &, à un petit nombre d’erreurs près, la mieux raisonnée. […] Il n’a garde a soin cependant a de ne pas s’y assujettir de maniére à négliger entiérement d’autres grammairiens philosophes tels que Dumarsais, Condillac, Harris, Sicard & Domergue, &~. »

Notamment cette dernière liste des auteurs cités est intéressante. Dans la circulaire du 24 messidor an 6 [12/07/1798], Locke, Condillac, Dumarsais, Court de Gébelin, Debrosses, Harris et Thurot sont recommandés. Ni Beauzée, ni Sicard, ni Domergue n’y figurent.[45]
    Dans sa lettre du 15 vendémiaire an 8 [07/10/1799],[46] Gattel donne la description la plus détaillée de son cours. Gattel y justifie sa démarche face aux ‘reproches’ du ministre[47] et souligne qu’il est tout à fait conscient de ce qu’on attend de lui:

« Lorsqu’au mois de Ventose an 4, premiere époque de l’établissement de l’École Centrale du Département de l’Isère, le Jury central d’instruction voulut bien jeter les yeux sur moi pour |2 le cours de Grammaire générale, je ne me trompai point sur ce qui devoit y faire la matière de mes leçons. »


[44] « II. Les professeurs, libres de choisir le mode d’enseignement qui leur paraîtra le plus convenable, sont néanmoins invités à se conformer, autant que possible, aux dispositions des lettres du ministre de l’intérieur, les 20fructidor an 5, 24 messidor |5 an 6, et 17 vendémiaire dernier; et à exiger de leurs élèves, 1°. Qu’ils analysent de mémoire, à chaque séance, la leçon précédente; 2°. Qu’ils rédigent ensuite par écrit cette analyse, avec les rectifications qui seront jugées nécessaires; 3°. Qu’à la fin de chaque partie, ils fassent des récapitulations sommaires, dans lesquelles les professeurs leur feront remarquer la liaison des principes qui auront été établis, et des conséquences qui devront en être déduites. » (Arrêté du 19 brumaire an 7 (AD L 517)).

[45] Pour le rôle du ‘grammairien-patriote’ Domergue cf. Busse 1986 et Busse/Dougnac 1992.

[46] AN F17 1344.

[47] « […] plusieurs professeurs de grammaire générale n’ont pas vu toute l’étendue de l’enseignement dont ils sont chargés: ils se croient bornés à la grammaire et c’est à tort. Le nom de grammaire générale donné à la chaire que vous occupez ne doit pas faire illusion. […] car votre cours doit comprendre l’idéologie, la grammaire générale, la grammaire française et la logique. » (Circulaire du ministre de l’intérieur du 5e jour complémentaire an 7 (21.9.1799) (AN F17 13384)).

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Il insiste sur le fait qu’il a toujours traité « l’analyse de la Pensée » comme base de « l’analyse de la parole » au début de son cours:

« Je jugeai qu’ayant à exposer, à développer à mes élèves les principes généraux de la Parole, je devois indispensablement commencer par leur faire l’analyse de la Pensée, dont la parole n’est que l’expression, & doit, en quelque langue que ce soit, offrir, autant qu’il en est possible, le fidèle tableau. »

Si l’on compare cette description du cours avec les précédentes, l’on constate que tous les éléments de ces descriptions y sont présents, quelquefois même mot à mot. Cependant les différentes parties sont décrites et expliquées de façon plus détaillée.[48] Ainsi il ne se limite plus à une référence générale à Condillac, Locke et les « autres métaphysiciens du temps », mais insiste particulièrement sur quatre aspects, à savoir la théorie des sensations, l’analyse, l’observation et le principe condillacien de la langue comme méthode analytique:

« Dans cette introduction, j’insiste principalement sur deux points fondamentaux: la théorie des sensations, d’où dérivent toutes nos idées & autres modifications intellectuelles; l’analyse, dont la nature a fait l’instrument universel de toutes nos connoissances. En traitant de la formation graduelle des idées générales, je m’étens sur l’observation, opération de l’esprit qui tient à l’une des plus précieuses facultés de l’homme, puisque sans elle nous ne pourons n’acquérir aucune connoissance des objets individuels, ni surtout les biens entr’eux par aucun rapport, mas même par une dénomination commune. Conduit de conséquences en conséquences, de vérités en vérité, jusqu’au principe si lumineux & si fécond de Condillac, que toute langue est une méthode analytique, je tâche de lui donner tout le développement qu’exige son importance & d’en faire à l’objet propre de mon cours une application, qui puisse rendre plus facile à des élèves de seize ans la carrière quelquefois si épinieuse qu’ils ont à parvenir? »

Avant de passer à la Grammaire générale, Gattel traite la question de l’origine du langage afin de réfléchir à la forme (hypothétique) de cette première langue:

« Je termine cette première partie par quelques réflexions sur l’origine des Langues, & sur les principales difficultés qui en ont nécessairement accompagné la formation. En me reportant à cette première enfance des Sociétés & du langage, j’examine ce qui a dû caractériser la nomenclature, la pronconciation, l’accent, le Style, la construction. Sans prétendre, en un mot, expliquer ce qui est encore pour les hommes les plus éclairés, pour les philosophes les plus profonds, un problème si difficile à résoudre; je tâche du moins, en profitant de leurs lumières de soulever un coin du voile, &, autant |3 qu’il m’est possible, de mettre les élèves sur la route de la nature. »

En ce qui concerne la Grammaire générale proprement dite, la description de Gattel ne diffère pas de celle de la première lettre. Il est encore plus remarquable que les changements effectués remontent à la circulaire de Quinette. Gattel insiste sur le fait qu’il a toujours accordé beaucoup d’importance à l’application des principes généraux[49]:


[48] Il est remarquable que Gattel continue à utiliser le terme de Logique pour l’analyse des idées, bien que Quinette ait utilisé le terme d’idéologie dans sa circulaire.

[49] Quinette avait revendiqué cette application et avait souligné son importance pour la formation d’un bon citoyen: « Ensuite il faut appliquer ces connaissances à la grammaire française, puisqu’elle est le premier pas dans l’étude des belles lettres; et enfin, il faut en tirer les règles de l’art de raisonner, puisque c’est là le fil conductueur qui doit aider les jeunes gens à apprécier les hommes et les choses, les faits et les institutions, dans les cours d’histoire et de législation, et les guider pendant le reste de leur vie. » (Circulaire du 5e jour complémentaire (AN F1713384)).

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« Les continuelles applications que je fais des principes généraux aux langues particulières soit anciennes, soit modernes, sont surtout relatives à la langue françoise, dont je ne laisse echapper aucune occasion de rapeler les règles, & d’éclairer les difficultés. Je n’oublie point que mon premier devoir est de former des citoyens; & que dans un état républicain, pour un gouvernement libre qui a pour base l’égalité établie par la nature entre tous les hommes, où chacun est appelé par la Constitution & peut être porté par son mérite aux fonctions publiques les plus relevées; chacun aussi doit travailler à pouvoir un jour les remplir dignement, en joignant aux vertus & aux lumières le talent de l’élocution, & par conséquent une connoissance approfondie de la langue. »

La description de la méthode du cours n’a pas changé, Gattel ajoute seulement que « [j]usqu’à présent le succès n’a point trompé les espérances que j’en avois conçues. »
    On peut donc constater que si la description du cours est plus détaillée dans la dernière lettre, Gattel n’apporte aucun changement fondamental à sa première définition, ses points de référence restant Condillac et Beauzée. Sa dernière lettre est plutôt une justification de sa conception du cours qu’une rectification ou un changement. Gattel semble vouloir souligner que les éléments requis par le ministre étaient déjà présents dans son cours.

 

2.3. Textes officiels

Alors que la correspondance entre Gattel et le ministère n’eut lieu qu’entre l’an 7 et l’an 8 [1798/99], les premières définitions de la Grammaire générale remontent à l’an 4 et se trouvent dans des textes officiels tels que les arrêtés et règlements, les programmes et les procès-verbaux des distributions des prix.[50] La première définition se trouve dans le règlement de l’an 4.[51] Gattel y définit la « parole, soit prononcée, soit écrite » comme « n’étant, dans quelque langue que ce soit, que la pensée elle-même rendue sensible, ou à l’oreille par des sons, ou à l’œil par des caracteres » et montre ainsi son orientation sensualiste. Comme décrit dans la lettre du 15 vendémiaire an 8 [07/10/1799], Gattel met en relation « l’analyse des opérations de l’esprit » avec les « différentes parties du discours ».[52] En ce qui concerne la subdivision de l’analyse de ces « parties du discours », il précède des plus petites unités jusqu’aux principes généraux communs à toutes les langues:

« Il considérera d’abord celui-ci dans ses plus simples éléments, qu’il suivra par degré jusqu’aux dernieres combinaisons, qui en sont le résultat, & dans ce développement successif & raisonné des principes généraux de la grammaire, principes fondés sur la nature des choses, & par-là communs à tous les idiomes existants ou même possibles. »


[50] Le fait que les définitions se trouvent au sein de types de textes différents peut être négligé pour la présente analyse.

[51] Arrêté de l’Administration centrale […] Reglement pour les Écoles Centrales […] (AD L 515). Parmi les manuscrits de Gattel conservés à la Bibliothèque municipale de Grenoble, l’on trouve plusieurs esquisses de textes pour des règlements, ce qui permet l’hypothèse que ces textes ont été rédigés par Gattel.

[52] Le terme « parties du discours » ne désigne pas encore les différentes espèces de mots. Gattel comprend par ce terme les plus petites unités de la langue ainsi que les « dernieres combinaisons ».

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Cette définition correspond déjà grosso modo à la structure de la Grammaire générale en éléments de la parole, éléments de l’oraison et éléments de syntaxe donnée par Beauzée, bien que Gattel n’utilise pas encore la terminologie de celui-ci. De même, l’application des principes généraux à la langue française revendiquée par Quinette dans sa ciculaire du 5e jour complémentaire est déjà présente: « Il s’attachera sur-tout à en faire des applications particulieres à la langue française. »
   Dans le Procès-verbal de la Distribution des Prix de l’an 5,[53] c’est-à-dire de la première distribution des prix dans l’histoire de l’École centrale, le fait qu’il s’agit d’une matière entièrement nouvelle est souligné.[54] La definition de la Grammaire générale n’y est pas identique à celle publiée dans le règlement: « Cette étude a pour base celle de la logique; ou plutôt, la Grammaire générale et raisonnée n’est elle-même qu’une logique véritable, puisque la parole doit être le tableau de la pensée, et qu’on ne peut mettre dans le discours l’ordre et l’arrangement convenables, qu’autant qu’on aura commencé par analyser les opérations de l’esprit pour en suivre fidèlement la marche. » L’analyse des « opérations de l’esprit » est toujours la base de l’enseignement de la grammaire. Les éléments qui viennent d’être ajoutés sont d’une part le terme ‘logique’ et d’autre part la conception que la parole est le ‘tableau de la pensée’. La définition est un résumé de l’article « Grammaire » de Beauzée publié dans l’Encyclopédie Méthodique.[55]
    À partir de l’an 6, cette référence à Beauzée est de plus en plus visible. Ainsi, l’on peut lire dans le programme de cette année[56] que le cours commence par une introduction aux « facultés et aux opérations de l’esprit humain ». Cette « analyse de la pensée » est suivie de l’analyse de la « parole », ce qui est justifié par le fait que « dans quelque langue que ce soit » celle-ci n’est rien d’autre que « la pensée elle-même rendue sensible, ou à l’oreille par des sons, ou à l’œil par des caracteres ». La structure de la définition est la même que dans le règlement de l’an 4, cependant des auteurs de référence sont mentionnés pour la première fois: « Le Professeur, d’après la Grammaire générale de Lancelot, celle de Beauzée, de


[53] AD L 517; BM U 5009.

[54] « Le cours de grammaire générale est une carrière presque entièrement nouvelle, ouverte par la sagesse du législateur au zèle et à l’émulation des jeunes amateurs des sciences et des lettres. » « L’administration a vu avec plaisir que les difficultés inséparables d’une étude en général aussi abstraite qu’elle est importante, loin de décourager les élèves qui ont suivi ce cours, n’avoit été pour eux qu’un aiguillon de plus. » (AD L 517 / BM U 5009).

[55] « C’est la science de la Parole prononcée ou écrite. La Parole est une sorte de tableau dont la pensée est l’original; elle doit en être une fidèle imitation, autant que cette fidélité peut se trouver dans la représentation sensible d’une chose purement spirituelle. La Logique, par le secours de l’abstraction, vient à bout d’analyser en quelque sorte la pensée, toute indivisible qu’elle est, en considérant séparément les idées différentes qui en sont l’objet, & la relation que l’esprit aperçoit entre elles. C’est cette analyse qui est l’objet immédiat de la Parole; & c’est pour cela que l’art d’analyser la pensée est le premier fondement de l’art de parler, ou, en d’autres termes, qu’une saine Logique est le fondement de la Grammaire. » (Beauzée 1782: 189).

[56] BM V 682.

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Dumarsais, de Condillac, l’Hermès d’Harris, etc., considérera d’abord le discours dans ses plus simples éléments qu’il suivra par degrés jusqu’aux dernieres combinaisons qui en sont le résultat. »[57] Ensuite, Gattel mentionne encore une fois les principes généraux et leur application aux langues particulières: « Dans ce développement successif et raisonné des principes généraux de la Grammaire, principes fondés sur la nature des choses, et par là communs à tous les idiomes existants ou même possibles, il s’attachera sur-tout à en faire des applications particulières à la Langue française. » Il termine le cours avec « l’analyse raisonné du Traité des Tropes par Dumarsais »; la structure du cours en quatre parties – Idéologie (‘Logique’) - Grammaire Générale - Grammaire française - Logique – correspond donc aux attentes du ministère avant que celui-ci ne les formulât explicitement.
    La référence à Beauzée est aussi présente dans le procès-verbal de la distribution des prix de l’an 6.[58] La première phrase du texte correspond presque mot à mot à la définition donnée par Beauzée dans son article « Grammaire »: « La grammaire générale est la science raisonné des principes généraux et immuables du langage prononcé ou écrit dans quelque langue que ce soit. » Dans ce texte, Gattel introduit un nouvel élément, à savoir la relation de la Grammaire générale à d’autres disciplines:

« […] la justesse que cette certitude communique à l’esprit, l’habitude qu’elle lui donne, de combiner ses idées et de les comparer entr’elles, lient intimément cette science aux mathématiques, et par celles-ci à toutes les sciences exactes: elle tient aussi par des nœuds aussi étroits, soit à la métaphysique dont elle nous fait connaître tout ce qu’il est utile d’en savoir, soit à l’éloquence et à tous les genres de littérature dont elle pose les bases, et dont elle est en conséquence le premier et le plus indispensable élément. »

Parmi les manuscrits de Gattel se trouve une esquisse du texte définitoire publié dans ce procès-verbal qui ressemble très fortement au texte discuté ci-dessus.[59] Cependant il y a une différence significative: Gattel y utilise le terme idéologie comme synonyme de métaphysique:[60]

« On voit par là que si à l’aide de l’analyse, le seul instrument qu’elle emploie, la Science grammaticale se lie intimément aux Mathématiques & a toutes les Sciences exactes; dont elles fait rigoureusement elle ne tient pas par des nœuds moins étroites, soit à l’ideologie ou métaphysique, dont elle nous fait connoitre tout ce qu’il est utile & même possible d’en savoir, soit à l’éloquence & à toutes les branches genies de la littérature dont elles pose les bases & dont elle devient en conséquence le premier & le plus indispensable élément. »


[57] Il est remarquable que Gattel mentionne Lancelot comme premier auteur. Comme nous ne disposons pas de manuscrits du cours pour cette année, il est cependant impossible de dire si l’ordre dans lequel les auteurs sont mentionnés est significatif pour la conception du cours.

[58] AD L 517.

[59] Esquisses du procès-verbal de la distribution des prix de l’an 6 et des programmes de l’an 8; Ms, 6p. (BM R 5633).

[60] Du moins dans les documents et manuscrits consultés pour cette étude, cet emploi est unique.

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D’après cette définition, la Grammaire générale est la base des autres sciences (y compris l’idéologie). Le fait que Gattel souligne la relation entre la Grammaire générale et d’autres filières comme les mathématiques, la métaphysique, l’éloquence et la littérature est d’autant plus remarquable qu’elle n’était pas encore mentionnée dans les circulaires. Le lien établi entre la Grammaire générale et les mathématiques apparaît aussi dans le texte concernant les mathématiques:

« Le but des Mathématiques ne diffère point de celui de la Grammaire Générale; Ces deux sciences ont une égale influence sur la justesse de l’esprit; elles suivent la même marche, emploient les mêmes procédés, & leurs résultats doivent être nécessairement les mêmes. / Ainsi la métaphysique du langage mathématique a-t-elle été d’abord enseignée avec le plus grand soin aux 34 élèves qui cette année ont formé la première section de ce cours & dont le plus grand nombre y sont entrés sans avoir la plus legere connoissance des premieres rèles. Le professeur a pensé avec raison que ce qui importoit le plus au bien de l’instruction & aux progrès des élèves étoit d’insister sur l’art difficile & trop peu connu de raisonner dans les sciences exactes. »

Cependant il est étrange que ni le lien entre la Grammaire générale et les mathématiques, ni le terme idéologie n’apparaissent dans les textes des années suivantes, donc après la circulaire du 5e jour complémentaire. Le programme de l’an 7[61] est presque identique à celui de l’an 6 et le texte publié dans l’arrêté du 19 brumaire an 7 [09/11/1798] correspond au texte contenu dans l’arrêté de l’an 4. Seule la fin de ce dernier texte est intéressante: « Le professeur aura soin de donner, de temps en temps à ses élèves, de bon discours et de bons livres, à extraire et à analyser. »[62] Cette phrase remonte sans doute à une recommandation faite par le ministre dans la circulaire du 17 vendémiaire an 7 [08/10/1798]: « Un des meilleurs moyens de disposer les jeunes gens à la précision, c’est de leur donner à extraire de bons discours et de bons livres. En les analysant, ils en expriment la substance et peuvent l’incorporer […] »[63]
   
Nous disposons pour l’instant d’un seul programme pour l’époque succédant après la correspondance de Gattel avec le(s) ministre(s). Ce programme datant de l’an 8[64] contient la définition la plus détaillée de toutes les définitions traitées jusqu’alors. Cette définition correspond en grande partie à la réponse à la circulaire du 5e jour complémentaire, certains aspects, comme par exemple la langue comme méthode analytique sont pourtant traités plus en profondeur.

« De développemens en développemens, on arrive à ce principe si lumineux & si fécond de Condillac, que toute langue est une méthode analytique. On en fait d’abord l’application au langage d’action, le premier que la nature a fait parler à l’homme, & d’après lequel ont été ensuite créés tous les autres. On montre que ceux-ci n’en diffèrent que par les signes qu’ils emploient; que ces signes, c’est-à-dire les mots, ne sont point des imitations, mais des symboles;


[61] AD L 517.

[62] AD L 517. Le procès-verbal de l’an 7 ne contient pas de description des cours.

[63] AN F17 13385.

[64] Les procès-verbaux des années 9 à 11 ne contiennent pas de textes définitoires (AD L 519; AD L 516; BM V.681, Q180, X.4563, U.1378).

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qu’ils sont les signes, non des objets individuels, non des idées sensibles & particulieres, mais plus proprement du moins, plus essentiellement & plus immédiatement des idées générales; enfin que, puisque ces mots ne sont pour la plupart que des signes de convention, les langues doivent différer, & diffèrent en effet les unes des autres, par la nomenclature, par la richesse & l’abondance, par l’arrangement des mots, par les idiotismes, &c. »[65]

L’explication de la diversité des langues contenue dans cette citation apparaît pour la première fois dans ce texte. Par ailleurs, Gattel remplace le terme observation par abstraction, sans pour autant changer la définition qu’il avait donnée dans sa lettre.[66] Dans les programmes précédents, Gattel s’était limité à citer quelques auteurs, à esquisser dans ses grandes lignes la relation entre l’analyse des idées et l’analyse du langage et à donner une brève définition de la Grammaire générale. Dans ce texte, en revanche, il décrit de façon détaillée tous les aspects qui seront traités dans son cours. Ce changement doit encore une fois être interprété comme réaction à la circulaire du 5e jour complémentaire où la conception du programme comme une sorte de guide pour les élèves est suggérée.[67] Le texte est suivi d’un tableau de la structure du cours[68] qui correspond exactement à la structure de la Grammaire générale de Beauzée.
    S’il est vrai que le programme de l’an 8 est le plus détaillé, il faut néanmoins constater que les fondements du cours, donc surtout les théories de Condillac et de Beauzée, restent les mêmes.[69] Avant de passer à l’analyse du manuscrit de Grammaire générale, il convient de retenir les aspects suivants: dès le début, les définitions contiennent l’analyse des idées et la Grammaire générale proprement dite. De même, l’application à la langue française (et à d’autres langues) fait partie de son cours. Les auteurs de référence cités sont Condillac et


[65] AN F1713384. Dans la lettre au ministre de l’Intérieur du 15 vendémiaire an 8 nous trouvons une explication beaucoup plus courte: « Conduit de conséquences en conséquences, de vérité en vérité, jusqu’au principe si lumineux & si fécond de Condillac, que toute langue est une méthode analytique, je tâche de lui donner tout le développement qu’exige son importance & d’en faire à l’objet propre de mon cours une application, qui puisse rendre plus facile à des élèves de seize ans la carrière quelquefois si épineuse qu’ils ont à parvenir […]. »

[66] « En parlant de la formation graduelle des idées générales, on traite de l’abstraction, opération de l’esprit qui tient à l’une des plus précieuses facultés de l’homme; puisque, sans elle, nous ne pouvons ni acquérir aucune connaissance exacte des objets individuels, ni sur-tout les lier entr’eux par aucun rapport, pas même par une dénominiation commune. Après avoir distingué les différentes especes d’abstractions, on en prouve l’utilité, & l’on prévient contre les dangereux abus qui en ont trop souvent perverti l’usage. »

[67] « Mais la lecture des programmes m’a fait naître une idée que j’aime à vous communiquer; c’est qu’au lieu de clorre l’année par la rédaction de ces sommaires de travail dont elles a dû être remplie, chacun des Professeurs devrait la commencer, peut-être, par un semblable résumé des objets principaux qu’il doit développer dans le cours de la classe. Ce prospectus, fait avec soin, pourrait être imprimé d’avance: proposé au public, il le ferait juger du but et de l’utilité de chaque cours particulier; envoyé au Ministre, il lui donnerait la mesure de ce qu’on doit attendre de chaque Professeur; remis dans la main des élèves, le programme serait leur livre élémentaire; c’est peut-être le seul qui leur soit convenable. Les développemens, les cahiers étendus, les ouvrages proprement dits, sont le livre du Professeur; celui de l’écolier ne doit être qu’une analyse qui présente sur la science une série de questions progressives et divisées suivant toutes les branches de la science à acquérir. C’est le canevas, le texte sur lequel le Professeur devra s’étendre en explications orales, dont il exigera que chaque éléve rende compte de vive voix et par écrit. » (AN F17 13385).

[68] Cette forme a aussi été proposée dans la circulaire du 5e jour complémentaire et a ensuite été dans l’arrêté de l’Administration centrale du 19 brumaire an 7 [09/11/1798].

[69] Le programme de l’an 8 contient encore une fois la définition de la Grammaire générale que Beauzée avait donnée dans l’Encyclopédie méthodique (cf. supra).

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Beauzée; leurs théories sont présentes dans les définitions même avant qu’il ne soient cités explicitement. Les descriptions du contenu du cours deviennent de plus en plus précises. Ces précisions sont sans doute dues au fait que Gattel se conforme aux suggestions faites par le ministre. Par ailleurs, la description de la partie nommée Logique (qui correspond à l’analyse des idées et donc à l’idéologie) prend de plus en plus de place. Si elle n’est que brièvement mentionnée dans les premiers textes, Gattel donne une description détaillée de cette partie dans le programme de l’an 8.

 

2.4. De la Grammaire

Jusqu’à maintenant, nous avons analysé des textes dans lesquels Gattel donne une description de son cours. L’analyse du manuscrit De la Grammaire permet de se faire une idée plus précise de son cours. Le manuscrit consiste principalement en deux parties: une partie concernant la Logique, une autre concernant la Grammaire générale proprement dite. Il reflète donc la conception du cours que Gattel avait esquissée dans ses lettres ainsi que dans les textes officiels.[70] Dans cette analyse, nous allons nous concentrer sur la partie du manuscrit qui concerne la Grammaire générale proprement dite. Néanmoins, la partie consacrée à la Logique mérite du moins quelques brèves remarques, car elle contient une partie non mentionnée dans les textes définitoires que nous avons vus jusqu’à présent: au milieu des cahiers (pp. 30-71), l’on trouve un traité sur l’Histoire de l’origine de la science grammaticale que Gattel emprunte à l’introduction de Thurot à la traduction de l’Hermès d’Harris:

« Le Traducteur François Thurot, outre un discours préliminaire fort bien fait & qui nous m’a fourni la plus grande partie / plusieurs / des faits rappelés dans cette notice historique, a enrichi son ouvrage de remarques très intéressantes, dans où il a exposé sommairement les théories nouvelles Théories grammaticales publiées dans divers écrits plus modernes, de maniere que ces remarques sont en quelque sorte le complément de l’ouvrage Anglois. » (p. 71).


[70] La Bibliothèque Municipale de Grenoble conserve en tout 11 cartons de manuscrits de Gattel concernant entre autres la rhétorique, les mathématiques et la physique (Ms 3910 – Ms 3968). Le manuscrit non signé intitulé De la Grammaire est un manuscrit de presque mille pages. Les 36 cahiers in-folio consistent en trois parties reliées ainsi qu’en une table des matières de la partie concernant la Grammaire générale (3 exemplaires), en un cahier de 7 pages contenant un traité sur les diphtongues (hors le numérotage des autres cahiers) qui se trouve entre le premier et le deuxième cahier et en une feuille non reliée intitulée « Articulation 13e Leçon ». Les trois parties sont structurées de la façon suivante: Ière partie = 14 cahiers (375 pages numérotées en continu); cette partie est composée d’une introduction à la Grammaire générale (pp. 1-5), d’une « Première partie. Des Eléments de la Parole » (pp. 5-148) et d’une « Seconde partie. Des Eléments de l’oraison » (pp. 149-375). IIe partie = 16 cahiers (358p.) qui contiennent la troisième partie de la Grammaire générale, les « Eléments de Syntaxe ». IIIe partie = 4 cahiers (88p.) concernant la Logique.

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Même si Gattel parle de ‘plusieurs faits’ que le discours préliminaire lui aurait fournis, il faut tout de même constater que son texte est en vérité une copie presque identique de ce discours.[71] La partie concernant la Logique semble servir d’introduction au cours entier:

« Nous tacherons de profiter, dans la suite de ce cours, des lumières que tant d’écrivains du premier ordre ont répandus sur sur les matieres qui en sont l’objet. Si la nature du sujet ne nous permet pas d’en écarter entierement les difficultés inséparables des discussions aussi métaphysiques & aussi abstraites, nous mettrons du moins tous nos soins à ce que l’ordre établi dans ces leçons, [] leur donne tout le degré de clarté dont elles sont susceptibles. » (p. 71).

Un premier coup d’œil sur la table des matières de la partie sur la Grammaire générale proprement dite révèle que Gattel reprend mot à mot la structure de la Grammaire générale de Beauzée. Une première comparaison de chapitres choisis arbitrairement dans les différentes parties du manuscrit montre qu’il s’agit très souvent de copies exactes des chapitres respectifs de Beauzée. Comme dans le cas du traité sur l’histoire de la science grammaticale emprunté au discours préliminaire de Thurot, Gattel renvoie à Beauzée sans pour autant révéler qu’il fait une copie presque fidèle du texte de celui-ci. L’exemple suivant est représentatif de cette démarche:

« La bouche est simplement plus ou moins ouverte pour la génération des quatre premières voix, qui retentissent dans la Cavité de la bouche. Beauzée (Gram. Générale) les appelle des voix retentissantes, & les voyelles que la / il donne le meme nom de représentent voyelles retentissantes, aux voyelles qui en sont la représentation. »

La première partie correspond mot à mot au texte de Beauzée tandis que la partie marquée explicitement comme emprunt constitue une paraphrase.

« La bouche est simplement plus ou moins ouverte pour la génération des quatre premières voix, qui retentissent dans la Cavité de la bouche: je les appellerois volontiers des voix retentissantes, & les voyelles qui les représenteroient seroient pareillement nommées voyelles retentissantes. »

Cependant, il y a aussi des passages qui ne remontent pas à la Grammaire générale de Beauzée. Quelles sont donc les sources utilisées pour ces passages ? À travers l’analyse détaillée de l’introduction et du premier chapitre (« Des élémens de la parole prononcée ou des sons »), nous allons par la suite essayer de donner une première réponse à cette question. Les quatre premières pages qui contiennent la définition et la structure de la Grammaire


[71] À partir du passage « L’histoire de l’origine de la science grammaticale […] » (Thurot 1796b: 66) jusqu’à « D’autres auteurs ont écrit sr la science grammaticale avec succès et en véritables philosphes; mais ils existent encore, et il ne m’appartient ni de les juger, ni d’assigner la place qu’ils peuvent occuper parmi les grammairiens illustres. » (Thurot 1796b: 119). Outre les deux paragraphes cités ci-dessus, Gattel ajoute une remarque sur l’importance des ouvrages de Duclos et d’Harris: « […] mais il manquerait trop de choses à cette nomenclature, si je négligeois d’y faire mention de deux ouvrages très distingués, l’un qui nous appartient en propre, l’autre qu’une raduction exacte & soignée vient tout recemment de |71 de faire passer dans notre langue. // Le premier ce sont les R a pour auteur Duclos, & porte le titre de/est intitulé/ Remarques sur la Grammaire générale de Port Royal. […] Le Second est originairement écrit en Anglois, & fut publié il y a à peu près quarante ans par Jacques Harris […]. » (pp. 69ss. du manuscrit).

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générale sont en grande partie empruntées à l’article « Grammaire » de l’Encyclopédie Méthodique rédigé par Beauzée. Des passages entiers (notamment la définition de la Grammaire générale comme science, de la grammaire particulaire comme art) sont identiques à ce texte. Le manuscrit s’écarte du texte de Beauzée dans la structure des sous-parties de la Grammaire générale. Tandis que Gattel reprend la distinction entre orthologie (« qui traite de la parole prononcée ») et orthographie (« qui traite de la parole écrite ou de l’Ecriture »), il réduit les sous-parties à Lexicologie et Syntaxe.[72] Beauzée distingue ensuite les sous-parties matériel, valeur et étymologie. Gattel subdivise la lexicologie en « élémens dont ils [les mots] sont composés », « les résultats divers de la combinaison de ces élémens, ce qui donne les mots proprement dits, appelés en d’autres termes parties ou élémens de l’oraison ». Cette subdivision recouvre seulement une partie du matériel et de la valeur. Après une brève définition de la syntaxe, Gattel constate en conclusion que la grammaire peut être divisée en trois parties principales, à savoir les Élémens de la parole, les Élémens de l’oraison et les Élémens de la syntaxe. On voit donc que Gattel reprend les définitions de l’article « Grammaire » mais adapte le contenu de cet article à la structure de la Grammaire générale de Beauzée.[73]
    Au cours du premier chapitre (pages 5 à 25 du manuscrit), Gattel procède à trois types de changements du texte de Beauzée. D’une part, il raccourcit des passages, ce qu’il fait surtout lorsque les explications deviennent trop complexes.[74] D’autre part, Gattel ajoute des passages entiers, dans la plupart des cas, il s’agit d’articles de l’Encyclopédie méthodique, comme par exemple l’article sur les « Enclitiques » de Dumarsais ou l’article sur le « Schéva »; une fois, il cite Harris dans la traduction de Thurot. Ces deux procédés peuvent être expliqués par le fait que Gattel s’adresse non pas à des spécialistes mais à des élèves et qu’il doit adapter le texte à leurs connaissances.
    Par ailleurs, Gattel ajoute des exemples issus du français mais aussi de l’anglais, de l’espagnol, et de l’italien (donc les langues pour lesquelles il a aussi écrit des dictionnaires). Dans l’exemple suivant, il illustre la prononciation du préfixe ‘in-’ dans ces langues:

« Observons au reste, au sujet de cette pronon ce son nasal de l’i, que, de toute les langues vivantes, la françoise |17 est la seule à laquelle il appartienne. Infante se prononce Dans l’italien


[72] Beauzée attribue ces deux parties à l’Orthologie. Pour l’Orthographie il distingue les sous parties logographie et lexicographie.

[73] La Grammaire générale de Beauzée paraît en 1767, les trois tomes de l’Encyclopédie méthodique concernant la grammaire entre 1782 et 1786.

[74] Par exemple il donne un résumé de deux phrases de la discussion des termes voix et son qui montrent que Girard utilise le terme son au lieu du terme voix qu’il préfère (avec Beauzée).

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& dans l’Espagnol se prononce ine-fante, & non pas comme in en fr nous dirons en françois ein-fante. L’Anglois prononce de même ine-fant & non pas ein-fant. »[75]

Il inclut donc l’application aux langues particulières dans la partie consacrée à la Grammaire générale. Ces trois types de changements se perpétuent aussi dans les autres parties du manuscrit.
    S’il est permis de se faire une idée de l’enseignement de la Grammaire générale à partir de ce document, il faut constater que Gattel se base – comme il le dit dans les autres textes que nous avons analysés – sur les théories de Condillac et de Beauzée, mais qu’il les ‘didactise’. L’élément nouveau qu’il introduit personnellement semble être l’application aux langues. Cet aspect est aussi souligné dans son Discours sur la grammaire & l’étude des langues non daté mais qui semble lui aussi avoir servi d’introduction à un cours de Grammaire générale[76]:

« Je hasarderai ensuite quelques reflexions tant sur l’utilité commune, que sur le caractère particulier des différentes langues à l’étude desquelles celles de la Grammaire Générale doit servir d’introduction. »[77]

 

3. Conclusion

Nous avons pu constater que l’influence des circulaires est très visible dans la présentation formelle du cours de Grammaire générale et va jusqu’à la reprise de formules de ces circulaires. Cependant, le contenu du cours ne semble pas beaucoup changer et Gattel s’efforce plutôt de montrer que son cours était dès le début conforme aux attentes du ministre. Ainsi il soutient qu’il ne se « trompa[i] point sur ce qui devoit y faire la matière de mes leçons. » Si Gattel ne compte pas parmi les professeurs les plus innovateurs, il n’est pas non plus un exemple typique de la « moyenne génération » qui se contente « souvent de propositions assez brèves » et préfère « la lecture de Court de Gébélin »[78]. Son cours comprenait les parties les plus importantes requises dans les circulaires et les textes qui sont à la base de son cours (Beauzée, Condillac, Locke, Encyclopédie méthodique, etc.) sont tous recommandés par le CIP.
    Deux aspects de son enseignement le distinguent certainement d’autres professeurs: d’une part, un intérêt marqué pour les aspects didactiques de l’enseignement de la Grammaire générale, d’autre part l’importance accordée à l’application des principes généraux aux


[75] De la Grammaire: 16s.

[76] « Cette explication est ici d’autant plus nécessaire que c’est à la Grammaire Générale que doivent être spécialement consacrées les leçons qui suivront ce discours, & qu’il importe, avant tout, d’en concevoir clairement & d’en bien définir l’objet. » (Discours sur la grammaire & l’enseignement des langues: 7). Gattel y reprend la définition de Beauzée et traite de façon détaillée la perfectibilité de l’homme. À la fin du discours, il traite des éléments plutôt traditionnels comme la clarté de la langue.

[77] Ibd.: 8.

[78] Schlieben-Lange 1992: 220.

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langues particulières.[79] Les additions faites au texte de Beauzée dans le manuscrit que nous venons d’analyser et peut-être le choix de ce texte même témoignent d’un effort de didactiser la Grammaire générale.[80]
    Le cas de l’enseignement de la Grammaire générale à Grenoble confirme une fois de plus que – contrairement à l’opinion de Brunot – « l’histoire de l’enseignement de la Grammaire générale dans les Écoles centrales n’est nullement une histoire des hésitations ni des échecs prévisibles » mais plutôt « un exemple inouï d’homogénisation quasi-totale ».[81] Par ailleurs, le fait que Gattel continua à enseigner au Lycée de Grenoble après la fermeture de l’École centrale laisse soupçonner que l’enseignement de la Grammaire générale s’y perpetua d’une façon ou d’une autre.

 

Bibliographie

A. Sources

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[Circulaire du] Ministre de l’Intérieur aux professeurs des Ecoles Centrales, du 24 messidor an 6. (AN F17 13384).

[Circulaire du] Ministre de l’Intérieur aux Professeurs et aux Bibliothécaires des Écoles centrales, Paris, le 17 vendémiaire, an 7 de la République française, une et indivisible. [08/10/1798] (AN F17 13385).


[79] Discours sur la grammaire & l’enseignement des langues: 4.

[80] Rappelons qu’il écrit dans sa première lettre au ministre concernant l’établissement d’un concours général qu’il a fallu renfermer ses élèves dans un cadre assez étroit pour ne pas leur demander trop. Par ailleurs, il justifie son choix de Beauzée par le fait que celui-ci lui a paru le plus méthodique et le mieux raisonné.

[81] Schlieben-Lange 1992: 224.

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Procès-verbal de la distribution des prix aux élèves de l’école centrale du département de l’Isère en l’an XI. Grenoble: P. Cadou et Duno, (1803), 14p. (BM U.1378).

Procès-Verbal de la Distribution des prix décernés aux élèves de l’École Centrale du département de l’Isère (Décadi 30 fructidor, an 6 de la République). A Grenoble, chez J. Allier, Imprimeur. (AD L 517 (f. 45-59 v°)).

Procès-Verbal de la Célébration de la Fête du Premier Vendémiaire an X, et de la distribution des Prix aux Elèves de l’Ecole centrale du Département de l’Isère.Impr. 3p. (AD L 516).

Procès-verbal des examens de l’école centrale de l’Isère. An 5 à l’an 11. Ms, 112p. reliées. (AD L 519).

Programmes des cours de l’école centrale du Département de l’Isère pendant l’an six de la République française: une et indivisible, Grenoble: J. Allier, 8p. (BM V 682).

Programmes Des Cours de l’École centrale du Département de l’Isere, pendant l’an sept de la République française, une & indivisible; dressés par les professeurs, & présentés à l’Administration centrale, par le jury d’instruction. A Grenoble. De l’Imprimerie de David cadet, Place de la Constitution. Impr. 15p. (AD L 517).

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Programmes des professeurs de l’École Centrale du département de l’Isère; pour les cours de l’an VIII [1799/1800]. Grenoble: Imprimerie de J.L.A. Giroud, place aux Herbes Impr. 37p. (AN F1713384).

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Tableau du nombre de Citoyens qui ont assisté aux Cours de l’Ecole centrale de l’Isère. Grenoble: Cadou et David aîné. Impr. 1p. (AD L 516).

Tableau des élèves de l’école centrale de l’Isère qui ont obtenu des prix ou des mentions honorables à la suite à la suite de l’examen général de l’an Onze. Grenoble: J.L.A. Giroud, 14p. (BM U.1375).

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